Ichinen Sanzen, 3000 mondes en un instant

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Article en lien avec la Newsletter #005 de Janvier 2023 « Ichinen Sanzen, 3000 Mondes en Un Instant ».

Ichinen Sanzen est un, -sinon le- Principe et Enseignement majeur et suprême du Sūtra du Lotus. « Sūtra du Lotus » est l’abréviation de « Sūtra du Lotus de la Loi Merveilleuse » ou, littéralement « Sūtra du Lotus Blanc du Véritable Dharma (« Loi »)« .

Ce Sūtra est lui-même le dernier enseignement et celui du plus haut degré du Bouddha Shakyamuni. Il représente l’essence même de son enseignement, qui concerne particulièrement la période que nous traversons de nos jours.

« Trois mille mondes en un instant » est une traduction du Japonais « Ichinen Sanzen ». Littéralement, « Ichinen » signifie « un temps incroyablement court », correspondant au temps occupé par une seule pensée. L’activité mentale produit environ et en moyenne 30 000 pensées par jour. Et « Sanzen » signifie « 3000 » mais aussi « beaucoup ».

Ichinen Sanzen évoque donc le fait que tous les phénomènes (Sanzen) sont contenus dans chaque instant (Ichinen). Mais il met en avant bien d’autres principes de la Loi de l’Un, relatifs notamment au cheminement et le développement de la Pleine Conscience. Ces enseignement s’avèrent être judicieux en ces temps de Transition qui n’en sont qu’à leurs prémisses.

Sūtra du Lotus de la Merveilleuse Loi - Ichinen Sanzen, 3000 Mondes en Un Instant - Franck Cohendet - Blog Suishō Reikidō® - https://suishoreikido.org/blog-suisho-reikido/
Sūtra du Lotus de la Merveilleuse Loi – Manuscrit ancien
SOMMAIRE DES CONTENUS Masquer
2 La révélation du Principe Ichinen Sanzen
2.2 Nichiren Daishōnin et la synthèse d’analyses de la vie élaborées à partir des Dix États, des Dix Aspects et des Trois Domaines de l’Existence

La mise en évidence des Lois cosmiques de l’existence et de la Manifestation

Ichinen Sanzen, « 3000 mondes en un instant » met plusieurs lois cosmiques en évidence, de façon implicite :

  1. L’existence, et par extension toute la Manifestation, est une expression fractale de la Création.
  2. Les lois immuables de l’Interdépendance et de l’Impermanence s’appliquent tant dans les dimensions, les états, et toutes manifestations dans la forme et la non-forme.
  3. Le Principe de Ichinen Sanzen est en lien direct avec nos « multiples vies en une seule », un phénomène tel un « multi-clônage » à la Naruto dans la manifestation de la Conscience. Dans son expression fractale, la Conscience s’auto-équilibre et équilibre en conséquence ses Chemins de Vie, qu’ils soient incarnés ou pas. La Conscience est ramifiée en plusieurs consciences qui communiquent subtilement tels des vases communicants. C’est ce qui prend figure de « lignes temporelles interdépendantes », résultant de l’interaction des vies de plusieurs êtres, émanant de la même Conscience. Cet auto-équilibrage est inhérent à toute « étincelle de Vie », de la particule à tout Être vivant, quelque soit son Règne, sa taille et sa dimension d’existence (humain, animal, végétal, minéral, êtres éthérés, …). Il suit les principes de l’Hormèse et de l’Homéostasie qui agissent tant au niveau biologique qu’aux niveaux plus subtils (énergétiques et éthérés, ou « spirituels »).

La révélation du Principe Ichinen Sanzen

Le principe tel qu’exposé par Zhiyi Sensē au 6ème siècle

Le Grand Maître chinois Tiantai (Tendai Chih-I ou Zhiyi -538-597-), consacra sa vie à l’étude du Sūtra du Lotus de la Loi Merveilleuse. Il révéla au 6ème siècle le principe de Ichinen Sanzen, dans le Maka Shikan (« Grande Concentration et Pénétration »). Le Maka Shinkan est une de ses trois œuvres majeures avec le Hōkke Mongu (« Mots et phrases du Sūtra du Lotus »), et le Hōkke Genji (« Sens profond du Sūtra du Lotus »).

Tiantai préconisa la « Triple Contemplation » :

  1. Tous les phénomènes ont une réalité transitoire (contemplation de l’illusion)
  2. L’essence de tous les phénomènes est la vacuité (contemplation de la vacuité)
  3. Tout est absolument vide et transitoirement réel à la fois (contemplation de la voie médiane)

C’est en revenant à la voie médiane que le Bodhisattva peut faire preuve d’une compassion éclairée et adaptée à la situation.

Cette triple contemplation, combinée avec une représentation de 3000 univers différents, donne la « Contemplation des 3000 » (一念三千, jp : Ichinen Sanzen, « trois mille mondes en un instant de vie »).

Ces « 3000 mondes en un instant » sont définis par :

  1. les “Dix mondes (ou états de vie)” et leur inclusion mutuelle (chaque état contient les 9 autres),
  2. combinant les “Dix facteurs (aspects ou modalités de vie),
  3. dans les “Trois niveaux d’existence (ou domaines de l’existence).

Cela fait [ (10 x 10) x 10 x 3 ] = 3000 mondes. C’est le principe énoncé par le grand maître Tiantai, qui est la base du Bouddhisme de Nichiren, moine érudit du 13ème siècle (1222-1282).

Nichiren Daishōnin et la synthèse d’analyses de la vie élaborées à partir des Dix États, des Dix Aspects et des Trois Domaines de l’Existence

Ainsi, Ichinen Sanzen est la synthèse d’analyses de la vie, élaborées à partir de différents points de vue. Ces points de vue sont les Dix États se contenant mutuellement, les Dix Aspects et les Trois Domaines de l’Existence.

Les Dix États

Ces Dix États sont :

  1. l’enfer,
  2. l’avidité,
  3. l’animalité,
  4. la colère,
  5. l’humanité,
  6. le bonheur temporaire,
  7. l’étude,
  8. l’absorption,
  9. l’état de Bodhisattva,
  10. l’état de Bouddha.
1- L’état d’enfer

En Japonais, l’enfer se dit Jigoku. « Ji » signifie « le plus bas, le sol ou la terre » et « Goku », « prison, pénitencier ».

Dans cet état là, on n’a aucune liberté et on n’éprouve que rancune et colère envers soi-même et les autres. C’est un état de souffrance totale, la fureur est le monde de l’enfer.

L’enfer n’existe pas en un lieu particulier, mais en l’humain et se reproduit ainsi dans sa vie elle-même.

2- L’état d’avidité

À propos de l’avidité, Nichiren Daishōnin dit que « la convoitise est le monde de l’avidité ». Dans cet état on est dominé par les désirs et on souffre d’insatisfaction, avant et après la satisfaction de chaque désir. L’insatisfaction est alors quasi permanente.

Ainsi cette quête ne connaissant ni le contentement, ni l’appréciation et la jouissance véritable, ni la gratitude, continu de nourrir l’avidité compulsive.

3- L’état d’animalité

L’animal n’a pas la capacité de discerner le bien et le mal, car il suit ses instincts de satisfaction primaires. C’est l’instinct de survie (programmation naturelle, automatisme et conditionnement réflexe). Il consiste à se nourrir, se reproduire et se protéger, soit par l’agression ou la fuite, soit par le soin à soi-même pour se guérir.

Cet instinct de « préservation de l’espèce » inclut aussi un instinct de rivalité et de concurrence, dans le but de la survie.

Lorsqu’un humain est dans cet état, il agit selon la loi du plus fort, dans un esprit de rivalité et concurrentiel.

4- L’état de colère

À propos de ce 4ème état, Nichiren Daishōnin dit « la méchanceté est le monde de la colère ».

Dominé par l’Ego, on désire paraître mieux ou meilleur que l’on est, et on devient alors incapable de distinguer ce qui est juste de ce qui ne l’est pas. On est en combat permanent avec soi-même et les autres ; combat qui se traduit la plupart du temps par de l’auto-sabotage.

Bien que « lorsqu’on gagne » (ou qu’on a l’impression de « gagner quelque chose de juste ») on éprouve une joie temporaire, fondamentalement et en réalité la colère reste un état de souffrance. L’Être s’empoisonne lui-même par cet état.

Les 4 premiers états

Ces 4 premiers états (enfer, avidité, animalité et colère) sont des états de souffrance.

En conséquence ils sont nommés « les Quatre Mauvaises Voies ».

5- L’état d’humanité

Pour ce qui est du 5ème état, Nichiren Daishōnin dit « le calme est le monde de l’humanité ».

Bien que cela semble être étonnant et paradoxal à la vue de notre monde, c’est pourtant la réalité fondamentale de l’Être humain.

Le Shintō dit aussi « l’Être humain a été créé pour être bon / bienfaisant » ou « l’Homme est fondamentalement bon ».

De leur côté, les Amérindiens, à l’arrivée des colons blancs, et après avoir constaté que « ces barbares sans égard pour la Vie et ses lois », se nommaient aussi « hommes » et en avaient l’apparence, décidèrent de s’appeler « êtres humains » ou « ceux qui marchent debout ». Ils prirent cette décision afin de s’en distinguer, s’en dissocier, et ne pas se sentir amalgamés à de tels êtres.

6- L’état de bonheur temporaire

« La joie est le monde du bonheur temporaire » dit Nichiren, mais comme elle survient à la satisfaction des besoins et désirs, elle est éphémère. Avec le temps, cette joie se dissipe.

Ainsi, cet état de joie temporaire, comme tous les autres 6 premiers états, dépend des circonstances et de l’environnement extérieurs. Dans ces états, on ne décide pas soi-même de notre état, et on ne connait donc pas de liberté.

Pour cela, les enseignements du Bouddha Shakyamuni concernent justement le fait de construire un état de vie indestructible, ou stable et inébranlable. La résolution de la souffrance humaine a été l’objet de recherche de Shakyamuni durant toute sa vie, à partir de son éveil en conscience à ces états de souffrance qui touchent le monde entier.

7- L’état d’étude

L’état d’étude est celui des personnes qui s’éveillent en entendant ou en prenant connaissance de l’enseignement du Bouddha.

Le support de cet éveil est alors celui des Sūtra et des paroles de sagesses transmises par Shakyamuni.

8- L’état d’absorption

Dans l’état d’absorption, on s’éveille soi-même, directement par l’observation des phénomènes.

Le support de la compréhension et du développement de l’éveil est alors le monde et la vie du quotidien.

Les Deux états s’ouvrant à la compréhension de l’Impermanence des phénomènes et des formes

Ces 2 états de l’étude et de l’absorption sont ceux où, comprenant l’impermanence de ce monde, on essaie de saisir la vérité permanente et on découvre une parcelle de cette vérité.

Mais cet éveil est seulement partiel. Trop préoccupé par notre développement personnel, on tombe dans un « égoïsme spirituel », et on ne peut apporter de bienfaits aux autres.

Dans cet état, la « bouddhéité » ou « l’état de Bouddha », transcendant la dualité dans l’unicité, est inaccessible.

9- L’état de Bodhisattva

La troisième des Quatre Nobles Voies est l’état de Bodhisattva. Le Bodhisattva est celui qui ne cesse de faire des efforts pour parvenir à l’éveil suprême, celui de l’état de Bouddha.

Il se caractérise par l’esprit de recherche visant cet état, et en même temps, par des actes en faveur des autres « créatures » ; qu’elles soient humaines ou d’autres Règnes du Vivant.

Dans cet état là on manifeste de la bienveillance envers les autres, le Bodhisattva n’est jamais méprisant.

Nichiren dit que « même un homme cruel et malfaisant peut aimer sa femme et ses enfants. En lui aussi réside une parcelle de l’état de Bodhisattva » ; bien qu’elle se trouve à l’état latent.

10- L’état de Bouddha

Cet état suprême d’accomplissement se caractérise par une bienveillance infinie à l’égard de tous les êtres. Il inclut aussi la sagesse permettant de percevoir le passé, le présent et l’avenir, ainsi que l’éveil à la Loi qui régit tous les phénomènes.

C’est un état indestructible de bonheur absolu.

Les Quatre Nobles Voies

L’Étude, l’Absorption, et les états de Bodhisattva et de Bouddha sont les 4 Nobles Voies, qui supposent un entrainement conscient, ou de fournir les efforts nécessaires pour y parvenir.

Ces Quatre Nobles Voies impliquent l’auto-discipline et le développement de la maîtrise de soi, en toutes circonstances et tout environnement, pour développer la Pleine Conscience.

L’enseignement du Sūtra du Lotus à propos des Dix États

Tout le monde possède chacun de ces Dix états de façon inhérente, bien que l’on soit tantôt dans l’un, tantôt dans l’autre.

L’inclusion mutuelle des Dix États signifie que chacun de ces états possède les neufs autres. Par exemple, l’état de Bouddha existe dans l’état d’enfer. C’est ce qui permet de dire que l’état de Bouddha est inhérent à la Vie de tous les mortels.

Alors, tous les êtres ont le potentiel d’atteindre l’état de Bouddha. Tel est l’enseignement du Sūtra du Lotus.

La parabole du potier au Chapitre 5 du Sūtra du Lotus

Cette inclusion des Dix états dans chaque état (10 x 10 = 100 états) se rapporte à la notion de Libre Arbitre ou de Libre Choix, fruit du discernement de la Conscience. Car cette liberté de choisir est également inhérente à chaque être.

Dans le Sūtra du Lotus, au Chapitre 5 « Les Plantes Médicinales », Shakyamuni donne la parabole du potier et de ses vases.

« C’est Ō Kāçyapa, comme quand un potier fait des pots divers avec la même argile. De ces pots, les uns deviennent des vases à contenir la mélasse, d’autres des vases pour le beurre clarifié, d’autres des vases pour le lait et pour le caillé, d’autres des vases inférieurs et impurs. La variété n’appartient pas à l’argile ; c’est uniquement de la différence des matières qu’on y dépose que provient la diversité des vases. De même, il n’y a réellement qu’un seul véhicule, qui est le véhicule du Bouddha ; il n’y a pas de second, il n’y a pas de troisième véhicule. »

Bouddha Shakyamuni – Sūtra du Lotus, Chapitre 5 « Les Plantes Médicinales »

Le potier utilise la même argile pour fabriquer différents vases. Mais ce qui fait la différence entre les vases, ce n’est pas l’argile formée par le potier, le « le véhicule » ou le « contenant » ; mais bien ce que les vases contiennent.

L’évocation des Trois Véhicules (« Trikāya ») n’en faisant qu’un seul

L’évocation des « Trois Véhicules » vient en réponse à la question de Kāçyapa, relative aux « Trois Corps des Bouddhas ».

Selon le principe de la Trikāya, un Bouddha a trois corps, appelés Dharmakāya, Sambhogakāya et Nirmānakāya.

  1. Le Dharmakāya est le corps du Dharma, ou corps de la réalité absolue, au-delà de l’existence et de la non-existence. Il est de la dimension de Vacuité ou de l’Éveil. C’est l’essence du Bouddha et c’est un corps sans forme.
  2. Le Sambhogakāya pourrait être considéré comme une interface entre les deux autres corps. Il est le corps de jouissance, corps de gloire, de félicité ou encore de rétribution. Il expérimente les fruits de la pratique bouddhique et le bonheur de l’illumination. Il exprime la sagesse des « cinq perfections ». Le mot « jouissance » réfère autant à la félicité inhérente à cette dimension, qu’à la jouissance des facultés éveillées, acquises en tant que résultat de « l’accumulation du mérite ».
  3. Le Nirmānakāya est le corps physique qui vit et meurt ; c’est le corps d’émanation, d’apparition ou de manifestation. C’est l’incarnation ultimement illusoire se manifestant dans les différents domaines du Samsara par compassion pour les êtres animés. Il permet ainsi les actions bienveillantes d’un Bouddha pour guider les êtres vivants vers l’Éveil, par la forme physique qu’il emprunte dans ce but.

Certains enseignants comparent Dharmakāya à la vapeur ou à l’atmosphère, le Sambhogakāya aux nuages ​​et le Nirmānakāya à la pluie. La conclusion de cette parabole est que les nuages ​​sont une manifestation de l’atmosphère qui permet la pluie.

Les deux derniers corps (Sambhogakāya et Nirmānakāya) sont le Rūpakāya, le « corps formel » ou « corps charnel ou de chair », c’est-à-dire perceptible.

Cependant, Bouddha Shakyamuni révèle à Kāçyapa que les trois corps ne font qu’un. C’est celui du Bouddha.

L’enseignement de la parabole du potier

La parabole du potier et des vases permet à Shakyamuni d’expliquer ce qui est important dans ce cheminement vers l’état de Bouddha, accessible à tous les êtres.

Nous sommes tous « faits de la même argile ». Et ce n’est pas de cette non-différence que la distinction de ce que nous partageons avec nous même, les autres et le monde peut s’établir. Ce qui nous permet de nous distinguer par la lumière et le bien que nous partageons et propageons, c’est « ce de quoi nous nous remplissons ».

En conséquence, ce contenu dont nous nous remplissons, devient « ce que nous sommes dans l’interaction avec nous-même et le monde ».

L’état de Bouddha est en nous, disponible à chaque instant. C’est par notre choix et force de Conscience que nous décidons de le contenir, en le faisant vivre pleinement en nous.

L’importance et la suprématie du Sūtra du Lotus de la Loi Merveilleuse sur tous les autres Sūtra

Le Sūtra du Lotus est le dernier enseignement de Bouddha Shakyamuni, qu’il a révélé durant les huit dernières années de sa vie terrestre. Il contient les principes les plus profonds de son enseignement.

Ces principes sont si révolutionnaires qu’ils paraissent contredire ses enseignements précédents.

« Dans le Sûtra du Lotus, [Shakyamuni] discrédita soudain tout ce qu’il avait enseigné précédemment, ce qu’il enseignait ou ce qu’il enseignerait à l’avenir en déclarant que seul le Sūtra du Lotus était véridique. Naturellement, ses disciples eurent du mal à le croire. C’est alors que le bouddha Tahō apparut, pour témoigner de la véracité de ce que Shakyamuni avait enseigné, et tous les bouddhas venus des mondes des Dix Directions confirmèrent ce témoignage en tirant la langue jusqu’au ciel de Brahma. »

Nichiren, « L’enseignement pour l’époque des Derniers Jours de la Loi »

Nichiren Daishōnin dit que « tous les Sūtra autres que le Sūtra du Lotus, exposés pendant plus de quarante ans, n’enseignent pas l’inclusion mutuelle des Dix États. Puisqu’ils n’évoquent pas l’inclusion mutuelle de ces états, ils ignorent la bouddhéité inhérente à la vie ».

Les Dix Aspects (Nyoze)

Les Dix Aspects sont les Dix Facteurs ou Modalités de vie, communs aux Dix États.

Ainsi, aussi bien l’état d’enfer que celui de Bouddha ou que les huit autres états possèdent ces Dix Aspects de la Vie.

Ces Dix Aspects, ou Facteurs ou encore Modalités de Vie sont :

  1. l’Apparence,
  2. la Nature,
  3. l’Entité,
  4. le Pouvoir,
  5. l’Influence,
  6. la Cause inhérente,
  7. la Cause externe,
  8. l’Effet latent,
  9. la Rétribution,
  10. et leur Cohérence du commencement jusqu’à la fin.

L’Apparence, la Nature et l’Entité concernent l’essence même de tous les phénomènes.

Le Pouvoir, l’Influence, la Cause inhérente, la Cause externe, l’Effet latent et la Rétribution désignent les modes de fonctionnement de la Vie.

La Cohérence du commencement jusqu’à la fin signifie que les trois premiers Aspects -apparence, nature et entité- et les six suivants -du pouvoir à la rétribution- se manifestent dans l’un des Dix États, mais qu’ils ne font qu’un entre eux.

Les Trois Domaines de l’Existence, ou Trois Principes de Différenciation (« San Seken »)

Les différences entre les Dix États de Vie se manifestent à divers niveaux :

  • dans le domaine des Cinq Agrégats (« Gōn Seken »),
  • dans le domaine des êtres vivants individuels (« Shujō Seken »),
  • et dans le domaine de l’environnement (« Kokudo Seken »).

Selon Tiantai, les Trois Principes de différenciation sont trois dimensions du monde phénoménal dans lesquelles les Dix États se manifestent.

Un être vivant est une Existence Individuelle qui, à tout moment, manifeste l’un ou l’autre des Dix États. Les Cinq Agrégats sont les éléments qui constituent un être vivant ; l’Environnement est le lieu où l’être vivant vit ou acte.

1- Le Domaine des Cinq Agrégats
Ce qui constitue les Cinq Agrégats :
  1. La Forme ou les phénomènes (« Shiki »), soit l’aspect physique de la vie, doté de couleurs et de formes. La considération de la forme comprend également les cinq organes sensoriels que sont les yeux, les oreilles, le nez, la langue et le corps ; par lesquels l’Être perçoit le monde extérieur. La forme concerne autant le corps physique de l’Être que tous les phénomènes physiques du monde extérieur.
  2. La Perception (« Ju »), ou la fonction de recevoir des informations extérieures et intérieures par les six organes des sens. Cela inclut les perceptions des cinq organes sensoriels plus les perceptions extrasensorielles de l’esprit. Ce dernier intègre et centralise les impressions des cinq sens, émotionnelles, celles du corps tout entier et intuitives. Cela concerne donc aussi les sensations et ressentis (agréables, désagréables, neutres).
  3. La Conception ou Conceptualisation (« Sō »), la fonction par laquelle l’esprit saisit et forme quelque idée ou concept de ce qui a été perçu. Ce sont les notions ou distinctions, la façon dont nous reconnaissons et interprétons les objets des sens (chaud/froid, propres/sales, bonnes/mauvaises, …).
  4. La Volonté d’accomplissement (« Gyō » ou « Ketsui »), le pouvoir de décision d’entreprendre une action, une activité, un acte quelconque, en fonction de ce qu’on a perçu, et dont on s’est forgé une idée. C’est aussi ce qui comprend tous les facteurs mentaux et les habitudes qui nous font réagir et qui motivent nos actes.
  5. La Conscience (« Ishiki »), la conscience mentale ou la fonction de l’esprit qui peut établir des jugements et des évaluations de valeur, comme distinguer entre le bien et le mal. Ishiki intègre également les quatre autres Agrégats. C’est donc la prise de connaissance de toutes les expériences faites par les cinq sens et le mental. La Conscience est le support de cette appréhension.
L’existence et l’influence des Cinq Agrégats et de l’Ego

L’enseignement du Bouddha insiste sur la nécessité de comprendre que le « Moi » est l’origine de toute souffrance.

Pour se libérer de tous les conditionnements qui génèrent cette souffrance, nous avons à comprendre que l’Ego n’existe pas de manière intrinsèque.

L’Ego s’identifie aux Cinq Agrégats synthétisés en Ishiki, la conscience mentale ; puisqu’il se construit sur l’observation et l’expérience des interactions intérieures-extérieures, ou de la dualité. Donc l’Ego est une conception mentale de notre être.

Le Bouddha démontre que notre individu (la représentation mentale du Moi égotique) n’est que la somme de ce qui le constitue, c’est-à-dire les éléments physiques et psychiques que sont les Cinq Agrégats. Ces éléments eux-mêmes n’ont pas d’existence propre. L’Ego n’est donc ni permanent ni autonome.

L’interaction des Dix États et des Cinq Agrégats

La Forme désigne l’aspect physique de la Vie et les quatre autres Agrégats sont liés à l’aspect spirituel de la Vie.

Les Cinq Agrégats sont ce qui constitue l’Individu (le « Moi » et le « Je »). Son existence étant temporaire et éphémère, les Cinq Agrégats n’ont pas plus d’existence propre et intrinsèque que le Moi. L’esprit se leurre en les tenant pour réellement existants par eux-même.

La Vie, dans chacun des Dix États, se manifeste en mettant en œuvre les Cinq Agrégats. Mais les fonctionnements de ces derniers ont différents effets, selon l’état dans lequel l’Entité de la Vie se manifeste.

Par exemple, dans la condition de l’état de l’enfer, un phénomène donné sera perçu comme une cause supplémentaire de souffrance. On y réagit alors avec haine et colère, aggravant ainsi la situation en soi-même et dans notre environnement.

Tandis que, dans la condition de l’état de Bouddha, le même phénomène sera perçut comme digne de compassion, et pourra bénéficier d’une action ou non-action résolutoire et libératrice. Car dans ce cas, ni notre centrage, ni notre alignement, ni l’intégrité et la force de notre Ki ne sont affectés.

La résolution des situations et états de souffrance passe donc par la libération qu’engendre le pouvoir de transcendance de la Compassion.

Pour résumer, dans les neufs autres états que celui de Bouddha, les Cinq Agrégats contribuent généralement à créer des souffrances et perpétuer des illusions. Tandis que, dans l’état de Bouddha, ils contribuent à créer le bonheur.

2- Le Domaine des êtres vivants

Le Domaine des êtres vivants consiste en individus, formés par une union temporaire des Cinq Agrégats.

Le Principe des Cinq Agrégats analyse les fonctions physiques et mentales qui composent un être vivant.

Le Principe des Êtres Vivants, lui, désigne un individu dans son intégrité, capable d’agir en relation avec son environnement.

Ce Principe peut recouvrir « l’être au pluriel », soit un groupe ou une communauté d’êtres vivants.

3- Le Domaine du Principe de l’Environnement

Le Principe de l’Environnement désigne le lieu où les êtres vivants habitent et où se situent leurs activités.

Les différences des Dix États se manifestent dans l’environnement en fonction de la condition de vie des êtres qui y résident.

Ainsi, Nichiren Daishōnin dit dans le Gosho (recueil des écrits de Nichiren) « Il n’existe pas deux terres, pure ou impure en elle-même. Il n’y a que la pureté ou l’impureté de nos esprits. »

Conclusion du Principe de Ichinen Sanzen

Le Principe de Ichinen Sanzen est la synthèse des Dix États, de leur inclusion mutuelle, des Dix Modalités ou Aspects de la Vie, et des Trois Domaines de la Vie.

Grâce à ce principe qui éclaire la vie dans sa totalité, il est devenu évident que tous les êtres peuvent atteindre l’État de Bouddha, puis de le maintenir de manière permanence dans l’impermanence de l’existence.

Le fait de ne pas céder aux spirales d’énergie des états les plus bas (états de souffrance), permet de rester centré, aligné et stablement équilibré dans un état de Pleine Conscience Éveillée. Dans cet état intérieur lumineux, les informations perçues touchent la réalité absolue.

Ainsi, ils guident l’Être vers les meilleures choix et décisions, et ses meilleurs comportements et actions qui en découlent. Ces meilleurs choix, décisions, comportements et actes sont ceux qui nous amènent à cheminer sur notre « ligne temporelle la plus lumineuse » et aimante.

Au contraire, se laisser aspirer par ces spirales d’énergies basses des états de souffrance, disperse notre propre énergie d’intention éclairée, de Foi et de Conscience. Alors nous Réagissons par automatisme au lieu d’Agir en conscience, et nos comportements et actes ne font qu’aggraver notre état et les situations. C’est le syndrome même de l’auto-sabotage, une forme « d’auto-vampirisation », car on « se vole à soi-même l’énergie vitale et lumineuse inhérente à l’Amour et au bonheur inhérent.

Le Principe de Ichinen Sanzen et le Gohonzon

Comme nous l’avons vu au tout début de cet article, en étudiant le Sūtra du Lotus, le Grand Maître Tientai (ou Zhiyi) élucida le principe Ichinen Sanzen.

Nichiren Daishōnin, lui, concrétisa ce principe par la « Loi du Daimoku » (la récitation du titre du Sūtra en Japonais : « Namu-Myōhō-Renge-Kyō« ), afin que tout le monde puisse pratiquer.

C’est en effet une pratique plus accessible au grand nombre, que celle de la Triple Contemplation, initiée par Zhiyi.

Nichiren disait que « il n’y a deux manières de percevoir le principe Ichinen Sanzen. L’une est théorique et l’autre concrète. Ichinen Sanzen, comme l’enseignait Tientai et Dengyō, était un principe théorique, mais Ichinen Sanzen comme je l’enseigne maintenant est un principe concret. […] Ichinen Sanzen, dans la pratique de Tientai et Dengyō, se rattache à l’enseignement théorique, tandis que Ichinen Sanzen, dans la pratique de Nichiren, fait partie de l’enseignement essentiel. »

Dengyō Daishō (titre posthume de Saichō −767-822) est le fondateur du courant bouddhiste Tendai au Japon, après avoir étudié l’enseignement de Tientai en Chine, dès le début du 9ème siècle.

Tientai et Ichinen Sanzen théorique

L’enseignement théorique du Sūtra du Lotus de Tientai disait que « la Loi Merveilleuse à laquelle le Bouddha s’est éveillé, par sa sagesse infinie, est l’Entité réelle de tous les phénomènes. Ensuite, Shakyamuni expliqua que les simples mortels, quel que soit leur état de vie, possèdent également en eux-même l’état de Bouddha. »

S’appuyant sur cet enseignement, Tientai expliqua que trois mille mondes existent en un instant, soit dans une seule pensée d’être mortel. Et il établit une pratique bouddhique consistant à méditer, ou plutôt « contempler ce phénomène dans notre propre Cœur ».

C’est ce qu’on appelle Ichinen Sanzen théorique.

L’inclusion mutuelle des Dix États, et donc l’implication réciproque de ces Dix États, permet la révélation de l’état de Bouddha, équivalent aux neufs autres états. C’est de ce phénomène que découle Ichinen Sanzen, et sa compréhension théorique.

Nichiren et la concrétisation du Principe Ichinen Sanzen

Pour les êtres qui vivent dans les derniers jours de la Loi (nos jours, fin du cycle de Kali Yuga ou d’Apocalipse − »Révélation−), Nichiren savait que la plupart seraient incapables de pratiquer la Triple Contemplation proposée par Tientai.

Nichiren Daishōnin a alors concrétisé le principe Ichinen Sanzen qui a permis au Bouddha fondamental d’atteindre la bouddhéité. Il a écrit que « la pratique de Nichiren est celle qui existe depuis le passé sans commencement. Aujourd’hui, elle n’est en rien différente du temps où l’on pratiquait dans l’étape « Myōji » (« Phénomène concret et individuel de lumière −ayant sa propre existence− »). »

Concernant le terme Myōji, il peut aussi s’agir d’une référence au « Myōju » (ancien terme pour « Mantra », le pouvoir des mots répétés) -Note personnelle-.

Plus concrètement, cela désigne « Nam(u) Myōhō Renge Kyō« , Shingon (« Mantra ») tiré du titre du Sūtra du Lotus en Japonais (« Myōhō Renge Kyō »).

Nichiren découvrit la concentration de l’essence du Sūtra du Lotus dans la profondeur d’un de ses chapitres. C’est pour cela qu’on l’appelle aussi « Ichinen Sanzen dissimulé entre les lignes ».

Car, littéralement, un passage de ce chapitre explique le principe de Trois mille Monde en Un Instant (Ichinen Sanzen) à travers le comportement de Shakyamuni, qui a atteint l’état de Bouddha « dans le passé sans commencement ». La cause (ou « graine ») de cette illumination est cachée entre les lignes, révélant que le titre du Sūtra contient toute son Essence.

Nam-myōhō-renge-kyō ne représente qu’une seule expression, mais ce n’est pas une expression ordinaire car elle est l’essence de tout le Sūtra. Vous demandez si l’on peut atteindre la bouddhéité par la seule récitation de Nam-myōhō-renge-kyō, et c’est bien la plus importante de toutes les questions. C’est le cœur de tout le Sūtra et la substance de ses huit volumes.

Nichiren, La phrase unique et essentielle, Écrits, 932-933.

Il dit aussi que « Avec une compassion profonde pour ceux qui ignorent le joyau de Ichinen Sanzen, le Bouddha fondamental l’enveloppa dans la seule phrase Nam’ Myōhō Renge Kyō ».

Nichiren Daishōnin consacra sa vie à l’étude du Sūtra du Lotus, pour en arriver à cette constatation.

Le Gohonzon

Le Gohonzon Mandara

Nichiren explique que le Gohonzon est la concrétisation, sous forme de Mandara (« Mandala » en Sanskrit), du principe Ichinen Sanzen, graine de la bouddhéité.

Il dit que « lorsqu’on récite Nam’ Myōhō Renge Kyō devant ce mandala, le lieu où l’on se trouve devient la terre du Bouddha, cet endroit devient le grand sanctuaire doté de la fonction de prévenir tous les maux ».

Sachant que le « Temple absolu » est notre propre corps, réciter ce Shingon (« Mantra ») en imprégnant l’esprit de l’image du Gohonzon, transforme de la même manière notre temple intérieur, tout notre être, et tout ce qui l’environne, par effet de résonance.

Je ne fais ici ni prosélytisme, ni ne demande à quiconque de croire ce que je communique ici.

En toute chose, la liberté du Libre Arbitre en Conscience est éprouvée par l’expérience de la pratique.

Ainsi, pour se faire une idée fondée et véridique d’une information, il n’y a que l’expérimentation et la vérification par la mise en application de cette information qui puisse pragmatiquement conforter l’acceptation ou non de l’information.

« Rien ne vaut la pratique et l’expérience personnelle ».

Conclusion sur le Gohonzon

Le Gohonzon manifeste le principe de fusion de l’être et de la Loi (cosmique, universelle ou divine).

Parce qu’il représente la vie du Bouddha fondamental lui-même, il est un des éléments qui différencient Ichinen Sanzen « concret » de Ichinen Sanzen « théorique ».

Nichiren ajoute aussi que « sans l’élément vital qui est la Foi, même regarder le Sūtra du Lotus est vain ».

Donc, dans l’absolu, le Gohonzon est un support facilitateur, pour activer la puissance de la Foi. Il s’imprègne de cette énergie de Foi, activée par le son et l’intention de réciter le Shingon « Nam’ Myōhō Renge Kyō ».

Par cet échange d’énergie portée par l’Intention, l’Attention (Concentration, dévotion) et le Son, tout en pratiquant avec une foi correcte dans le Gohonzon, et en conscience de ce qu’il porte en son essence ; manifeste sa force immense.

Cependant, le Gohonzon n’est pas indispensable, car l’essentiel reste en toute chose notre Pleine Présence et la Foi, en toute circonstance et situation de l’Ici et Maintenant.

Au final, sa « force immense » est de révéler la nôtre, ce Ki ou Reiki qui nous vient et qui Est celle de « l’Uni-vers-l’Uni ».

Nous avons « tout en nous-même ».

Le Gohonzon est, comme tout Mandala, un guide, une « roadmap », une voie pour développer la Foi, notre relation au Soi et au Tout.

Mais cela n’enlève rien à la richesse de cette voie que représente le Gohonzon, né du pinceau de Nichiren Daishōnin. Car il manifeste l’expression condensée du dernier, suprême et plus profond des enseignements du Bouddha Shākyamuni.

Mots de la fin et du début

Bouddha Shakyamuni a dit « dix mille voies, dix mille êtres ».

C’est à chacun(e) de trouver Sa voie, résonnant en harmonie et lumière avec son Cœur.

Car c’est du Cœur que naît et qu’émane la Foi.

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© Franck Cohendet ⋅ Suishō Reikidō® − Janvier 2023 – Morlaàs, Pyrénées-Atlantiques, France

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